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Laissez vos enfants manger leurs bonbons d’Halloween

Rédigé par Catherine Pelletier

Laissez vos enfants manger leurs bonbons d’Halloween

Par Sarah Lê, Dt.P. Nutritionniste-Diététiste
En collaboration avec Marilou Morin, Dt.P. Nutritionniste-Diététiste (www.mangerenharmonie.com) 

Ahh l’Halloween! Ce moment de l’année tant attendu par les enfants! Or, bien des parents s’inquiètent lorsqu’ils les voient arriver avec leur taie d’oreiller remplie de friandises!

Dans notre société actuelle, il est très facile d’adopter une mentalité de « tout ou rien » avec la nourriture. Les parents, bombardés d’information, sont souvent confus et ne savent pas quelle direction prendre pour élever des enfants en bonne santé et à l’écoute de leur corps.

Souhaitant ce qu’il y a de mieux pour leurs enfants, les parents ont souvent le réflexe de limiter, de contrôler ou même d’interdire certains aliments (tels que les bonbons) au nom de la santé. Cette interférence a tendance à aller à l’encontre de l’objectif souhaité, soit d’aider les enfants à avoir une relation saine avec la nourriture. Effectivement, les enfants pourraient alors développer des comportements malsains tels que manger en cachette, cacher de la nourriture ou encore trouver une manière de s’en procurer (comme à l’école, chez le voisin, etc.). Ces comportements s’accompagnent habituellement d’un sentiment de culpabilité et de honte, ce qui les met à risque de développer des désordres ou troubles alimentaires plus tard.

 

 Le phénomène de la restriction

Toute chose défendue sera toujours plus désirable et attirante, peu importe ce que c’est. C’est un comportement normal et humain. On est toujours attiré par ce qu’on ne peut pas avoir. Je vous donne un exemple : imaginez que vous invitez votre enfant à jouer dans une chambre remplie de jouets. Vous lui dites qu’il peut jouer avec tous les jouets SAUF un jouet en particulier. Qu’arrivera-t-il, selon vous? Eh oui! Son attention va graviter autour du jouet interdit. Il n’arrêtera pas d’y penser, de poser des questions à propos de ce jouet, de demander pourquoi il ne peut pas jouer avec. Et le tout deviendra obsessif, pas parce que le jouet est unique ou spécial, mais parce qu’il est défendu, tout simplement.

Le même principe s’applique aux friandises (ou à tout autre aliment défendu)! En effet, des études ont démontré que la restriction alimentaire mène à la surconsommation1. Lorsqu’on empêche un enfant de manger un certain aliment, ceci l’inciterait à en manger au-delà de ses besoins, de peur d’en manquer2-4. Ce phénomène se produit autant chez les enfants que chez les adultes5, 6.

À l’inverse, les enfants à qui on donne la permission de manger des friandises en consomment moins et prennent moins de poids à long terme7-9.

 

L’effet d’habituation

C’est simple, plus on mange d’un aliment, plus il perd son attrait. On se lasse et notre corps nous demande de manger autre chose pour trouver l’équilibre. Plusieurs études ont démontré l’effet d’habituation avec différents aliments, dont la pizza, le chocolat et les chips10.

 

À chacun sa part de responsabilité

À la lumière de la recherche, plutôt que de dicter, de contrôler ou de limiter ce que les enfants mangent, il est préférable de les laisser explorer et apprendre par eux-mêmes. Évidemment, les enfants ont besoin d’un minimum de structure dans leur routine quotidienne. Ainsi, une structure dite « flexible » permettrait au parent et à l’enfant de reconnaître leur part de responsabilité.

Le parent est responsable d’offrir une variété d’aliments, d’établir l’horaire des repas et collations et de choisir où les repas seront mangés (la majorité du temps à table, pas devant la télévision ni dans les chambres à coucher). L’enfant est responsable de décider s’il mange ou pas, des quantités ingérées et des aliments choisis*.

*D’après le modèle « Division of Responsibility » d’Ellyn Satter.

 

Quelles stratégies utiliser avec son enfant pour l’Halloween?

  •  En revenant de sa cueillette de bonbons, proposez-lui de faire le tri de son sac et de choisir ceux qu’il préfère.Il est possible que ce soit l’entièreté de sa récolte s’il n’est pas habitué d’avoir le droit le manger des bonbons. Donnez-lui la permission de manger la quantité qu’il veut (s’il en a envie), tout en lui rappelant qu’il pourra en manger plus tard. Ce processus lui permettra d’explorer ses propres besoins et de reconnaître ses limites. Tâchez de ne pas faire de commentaire sur le choix des bonbons ni sur la quantité consommée.
  •  Choisissez à quel(s) repas et collation(s) vous désirez offrir ses bonbons préférés.Ça n’a pas besoin d’être à chaque repas, mais ça ne doit pas non plus être rare au point où votre enfant a l’impression que les bonbons sont limités. 
  • Plutôt que d’offrir les bonbons après le repas, servez tout en même temps. Placez le plat principal ainsi que les bonbons au centre de la table, puis laissez votre enfant se servir lui-même. Si votre enfant semble « accro » au sucre, c’est généralement un signe qu’il a subi une forme de restriction ou de contrôle par le passé. Pas de panique! Lorsque vous commencez à l’exposer aux sucreries et aux desserts, il se peut qu’il les préfère aux autres aliments. Cependant, son intérêt diminuera avec le temps (effet d’habituation). À noter que ce processus peut s’étendre de quelques semaines à plusieurs mois. Votre plus grand défi sera d’avoir confiance. Sachez que lorsqu’on met fin à la restriction alimentaire, on finit par s’habituer à des aliments qui auparavant nous obsédaient. On peut même se rendre compte que l’attrait de ces aliments découlait de l’interdit plutôt que de leur goût. 
  • Évitez de négocier. Par exemple, lui dire « tu auras du dessert quand tu auras fini ton assiette/tes légumes/ta viande » renforce l’idée que le dessert est « spécial » et une « récompense ». 
  • Évitez d’utiliser la nourriture comme une punition ou une récompense. Il est préférable de parler de la nourriture de façon neutre et sans jugement. 
  • Évitez d’utiliser les termes « bons » et « mauvais ». Cette vision dichotomique des aliments est non seulement erronée, mais elle peut nuire à la relation de votre enfant avec la nourriture. On peut utiliser des termes tels que des « aliments qui nourrissent ton corps et t’aident à grandir », ou encore « des aliments pour le plaisir », ou encore plus simple, « des aliments » ;).
  • Faites confiance à votre enfant. Lorsqu’on n’intervient pas, un enfant a une capacité instinctive de reconnaître ses signaux de faim et de satiété. Essayez de le laisser explorer et réfléchir par lui-même. 
  • Gardez une vue d’ensemble. Un aliment ou un repas à lui seul n’est pas déterminant de la santé à long terme. Bien sûr, votre enfant mangera probablement plus « sucré » à certains moments (comme à l’Halloween), mais son alimentation s’équilibrera par la suite sur d’autres journées. 
  • Questionnez-vous sur votre propre relation avec la nourriture. Vous donnez-vous la permission de manger des bonbons ou sont-ils défendus? Parlez-vous de certains aliments comme étant « bons » ou « mauvais », ou encore « permis seulement la fin de semaine ou aux occasions spéciales »? Ne pas faire confiance à son enfant en présence de sucreries est possiblement une projection de votre propre relation avec la nourriture et votre corps. Travailler sur votre propre relation avec la nourriture pourrait être bénéfique autant pour vous que pour votre enfant. 

En résumé, notre rôle, en tant que parent, est d’amener notre enfant à établir une relation saine avec la nourriture. En d’autres mots, nous devons le guider de façon à ce que la nourriture ne soit pas source d’angoisse ou de stress, mais seulement de plaisir et d’enrichissement. Le plaisir de manger constitue le fondement d’une alimentation variée et équilibrée, au sein de laquelle tous les aliments prennent naturellement leur place. Ainsi, les bonbons nous procurent saveur et bonheur, et cela suffit pour les accueillir à bras ouverts. 

Joyeuse Halloween! 

Ps : ce texte se veut informatif et ne sert qu’à des fins d’éducation générale. Vous demeurez l’expert de votre enfant et de votre réalité et il se peut que certains points ne s’appliquent pas à vous. Si vous avez des préoccupations sur la relation qu’a votre enfant avec la nourriture, prenez rendez-vous chez Douceurs et petit poids en appelant au 450-482-1475.

 

Références :

  1.  Polivy, J., Zeitlin, S. B., Herman, C. P., & Beal, A. L. (1994). Food restriction and binge eating: A study of former prisoners of war. Journal of Abnormal Psychology, 103(2), 409-411. 
  1. Birch, L. L., Fisher, J. O., & Davison, K. K. (2003). Learning to overeat: maternal use of restrictive feeding practices promotes girls' eating in the absence of hunger. The American journal of clinical nutrition78(2), 215–220. doi:10.1093/ajcn/78.2.215 
  1. Rollins, B. Y., Loken, E., Savage, J. S., & Birch, L. L. (2014). Effects of restriction on children’s intake differ by child temperament, food reinforcement, and parent’s chronic use of restriction. Appetite73, 31–39. doi:10.1016/j.appet.2013.10.005 
  1. Jansen E, Mulkens S, Emond Y & Jansen A (2008). From the Garden of Eden to the land of plenty. Restriction of fruit and sweets intake leads to increased fruit and sweets consumption in children. Appetite.,51(3), 570-5. doi: 10.1016/j.appet.2008.04.012. Epub 2008 Apr 22. 
  1. Holmes, M., Fuller‐Tyszkiewicz, M., Skouteris, H., & Broadbent, J. (2014). Improving prediction of binge episodes by modelling chronicity of dietary restriction. European Eating Disorders Review, 22(6), 405-411. 
  1. Mann T. & Ward A (2001). Forbidden fruit: does thinking about a prohibited food lead to its consumption? Int J Eat Disord.Apr;29(3):319-27. 
  1. Fisher JO., & Birch LL. (2002). Eating in the absence of hunger and overweight in girls from 5 to 7 y of age. American Journal of Clinical Nutrition, 76, 226-231. 
  1. Faith MS., Scanlon KS., Birch LL., Francis LA. & Sherry B (2004). Parent-Child Feeding Strategies and Their Relationships to Child Eating and Weight Status. Obes Res.,12,1711-1722. 
  1. Faith MS., Berkowitz RI., Stallings VA., Kerns J., Storey M., Stunkard AJ. (2004). Parental Feeding Attitudes and Styles and Child Body Mass Index: Prospective Analysis of a Gene-Environment Interaction. Pediatrics, 114:e429-436. 
  1. Ernst M. M (2002). Habituation of responding for food in humans. Appetite 38, 224-234 doi : 10.1006/appe.2001.0484

 

Sarah Lê est Diététiste-Nutritionniste et membre de l’Ordre professionnel des diététistes du Québec. Depuis de nombreuses années, elle aide ses clients à améliorer non seulement leurs habitudes de vie, mais également leur relation avec la nourriture et avec leur corps. Elle offre des services de consultation pour la clientèle adulte et pédiatrique à la clinique de Douceurs et Petits Poids.